«Je veux voir», a dit Catherine Deneuve dans le film de Joana Hadjithomas et Khalil Joreige. Elle s’est engouffrée dans une petite voiture sur les routes cahoteuses du Sud, en compagnie de Rabih, direction Bent Jbeil. Pour ensuite revenir vers la capitale, découvrir la société beyrouthine en plein exercice de résilience…
Autres lieux, autre histoire, «Valse avec Bachir» d’Ari Folman qui ne passera pas dans les salles libanaises. Sous forme de film d’animation et sous couvert de psychanalyse, un ex-soldat israélien veut faire remonter ses souvenirs personnels à la surface. Ceux d’une fin d’été 1982. Et d’un abominable massacre. Madame aussi a voulu voir ce que le cinéma de l’autre voulait bien raconter… Elle l’a visionné il y a quelques années dans une des salles obscures aux abords des Champs-Élysées.
Si elle aime voir sur grand écran, entre réel et imaginaire, ce qu’est son pays. Ou n’est pas… West Beirut restera son coup de cœur! C’était une de ses toutes premières fois – sans compter les chefs-d’œuvre de Maroun Baghdadi, qui eux parlent d’une autre époque… –. Encore vierge de scénarios libanais, Madame ne demandait qu’à y succomber!
Quelques années plus tard, elle se surprendra à verser des larmes d’émotion, visionnant Caramel pour la énième fois, mais cette fois assise près du hublot, dans l’avion. Car, comme Danielle Arbid, elle fut cette «émigrée», cette… Parisienne, un temps. C’est d’ailleurs Carrefour de l’Odéon qu’elle ira assister à Incendies de Wajdi Mouawad. À la sortie, se retrouver à l’air libre, sur le trottoir du boulevard Saint-Germain, l’envie de se voiler la face, de vomir tout son être… Libanais. Madame n’est toujours pas remise de ce film coup de poing.
Puis elle a appris à rire de sa condition. Surtout si elle est célibataire, au bled. Madame a ainsi vu, et apprécié, Yalla 3a2belkon banet puis Yalla 3a2belkon chabeb. Deux films qui collent à la réalité d’une société tout en contradictions. Bienvenue en absurdie, ou le quotidien de tout un chacun et chacune pour peu qu’il/elle résiste à l’appel de la fameuse bague au doigt «à tout prix».
Drôle par moments mais bien moins léger, Nuts. Non pas un film sur la guerre. Mais tout aussi violent, meurtrier. Au cinéma l’on voit aussi ce que l’on refuse de voir en vrai. Des couples qui s’ennuient, qui se mentent… Des rencontres de caniveaux, pour peu que l’on s’aventure dans cet univers souterrain, à Beyrouth ou dans toute autre ville, délaissant ainsi le confort d’une petite vie bourgeoise. Tel fut le choix de Lana, l’actrice principale. On peut aussi décider de passer à côté de cette réalité, et mener une petite vie tranquille, sans jamais ouvrir la boîte de Pandore. Sans jamais acheter ce ticket de cinéma. Pourquoi dépeindre ce bas monde? Pourquoi tant de noirceur? Il est vrai que Madame sort bien dégoûtée de la salle obscure. Mais dans la vie comme au cinéma, tout est affaire de choix personnel. À chacun de choisir la salle obscure, la destination, le voyage et les expériences qu’il veut vivre…
Madame, elle, succombe à la magie. Sciemment, confortablement, elle se laisse bercer au rythme de Listen. Philippe Aractingi signe là après Bosta et Héritage, un véritable bijou. Un film tout en délicatesse. Sensualité, drame, humour, amour… Tout y est. Listen remporte la palme de l’enchantement, 2017!
S’il reste bien des films libanais non vus, et d’autres dont elle a oublié le nom… aujourd’hui, Madame est heureuse de voir que le cinéma libanais s’est émancipé et diversifié. Il peut compter sur ses encouragements.
Surtout, il y a encore tous ces longs métrages qu’elle veut encore voir…
Promis, au gré des tickets achetés, Madame se fera son propre film. Et elle invite chacun à faire de même.
L.Z.