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Santé

La vitamine D EN QUESTIONS

À l’occasion du séminaire “The Bone & Joint World Network Conference 2011”, placé sous l’égide du ministre de la Santé libanaise, rencontre avec le Dr Naim Maalouf MD, endocrinologue à UT Southwestern Medical Center à Dallas aux  États-Unis, qui aborde les dernières études entreprises sur la vitamine D.

près des décennies d’indifférence, la vitamine D a le vent en poupe chez les chercheurs. Indispensable pour fixer le calcium, elle joue un rôle essentiel dans le métabolisme. De récents travaux suggèrent même qu’elle pourrait prévenir certains cancers (en particulier du côlon), le diabète de type I, les accidents cardiovasculaires ou encore la dépression saisonnière.

Quel est le dosage conseillé en vitamine D aujourd’hui?

D’après des études avancées, chez les personnes de plus de 65 ans, une prise quotidienne de 800 unités internationales de vitamine D diminue de 20% le risque de fractures non vertébrales et de 18% celui du col du fémur. De 0 à 12 mois, 400 unités. Chez les personnes entre 1 an et 65 ans, en moyenne 600 unités/jour. Toutefois, les obèses en ont un plus grand besoin, car la graisse absorbe la vitamine D.

Est-il possible d’atteindre ces doses à travers l’alimentation?

Les aliments riches en vitamine D sont peu nombreux, d’où le besoin de supplémentation. Toutefois, d’après certaines études, le corps peut fabriquer les doses nécessaires recommandées lorsqu’il est exposé au soleil. Il serait donc logique de considérer que ce que l’organisme fabrique par lui-même est sécuritaire. Chaque cas étant différent, il faudrait consulter son médecin avant la prise de toute supplémentation.

Quels sont les aliments riches en vitamine D?

Les huiles de foie de poissons, certains poissons gras (sardines, harengs, maquereaux, saumon, thon), le jaune d’oeuf, le foie de veau, certains champignons et le beurre.

L’huile de foie de morue offre-t-elle une supplémentation complète?

La dose journalière apporte le tiers des besoins. Pour ce qui est des aliments enrichis comme les huiles, le beurre ou le lait, les quantités autorisées sont infinitésimales par rapport aux besoins.

À partir de quel âge ressent-on les carences?

Les spécialistes sont de plus en plus favorables à une supplémentation systématique dès 65-70 ans, d’autant plus que les preuves scientifiques des bienfaits de cette vitamine sur l’organisme se multiplient. Chez les personnes âgées, une prise quotidienne diminue les risques de fracture et prévient les maladies cardiovasculaires.

Comment se fait-il qu’au Liban, pays très ensoleillé, on remarque une carence significative en vitamine D chez la majorité des habitants?

C’est une combinaison de plusieurs facteurs. Cette carence est marquée chez les femmes voilées et les personnes utilisant des écrans totaux. Le voile et l’écran sont des barrières qui empêchent la vitamine D offerte par le soleil d’être synthétisée par la peau.

Mais il existe des campagnes mettant en garde contre les risques de cancers de la peau dus à l’exposition aux rayons…

On estime que l’exposition au soleil peut procurer 80% à 90% de la vitamine D requise. Une simple exposition (sans écran solaire) des mains, des avant-bras et du visage, pendant 10 à 15 minutes, entre 11h00 et 14h00, à raison de 2 ou 3 fois par semaine, suffirait à assurer un apport adéquat à une personne en bonne santé. Ceci est une moyenne afin de maintenir un bon niveau, car l’organisme a la capacité d’emmagasiner la vitamine D dans les tissus gras. Après ces 10 à 15 minutes, il faut appliquer un écran total, pour éviter le risque de cancer de peau.

Quels risques en cas de surdosage?

Des effets indésirables peuvent apparaître: perte d’appétit et de poids, nausées, faiblesse, convulsions, anomalies sanguines… Mais aussi, plus graves, des calculs rénaux, des dépôts sur les vaisseaux sanguins conduisant à des problèmes cardiaques…

Connue principalement comme étant liée aux os, la vitamine D joue, semble-t-il un rôle protecteur au niveau de pathologies diverses. Didier Le Bail, naturopathe et journaliste santé, considère la déficience en vitamine D comme une épidémie. La carence en vitamine D qui semble toucher près de la moitié de la population mondiale expliquerait l’augmentation de maladies telles que cancers, hypertension, diabète, grippe, asthme, et même la dépression et l’autisme! Dans son livre “Et si vous manquiez de Vitamine D?” paru aux éditions Mosaïque-Santé, Didier Le Bail tire la sonnette d’alarme.

La vitamine D serait donc une hormone, dites-vous?

Effectivement, c’est une vitamine découverte dans les années 1920 et classée parmi les vitamines. Il a fallu plusieurs décennies avant que l’on en comprenne les métabolismes. La vitamine D que l’on ingère via l’alimentation et la supplémentation n’est pas une hormone bien sûr. C’est seulement une fois transformée dans l’organisme qu’elle se mue en hormone et qu’elle agit à des niveaux autres que le niveau osseux.

Un excédent ou une overdose de vitamine D peut-il être nocif?

Aujourd’hui on risque plus d’avoir une déficience qu’un excédent de vitamine D! Il y a une véritable épidémie mondiale! Pour tomber dans un excès il faut vraiment que cela soit accidentel, par exemple si l’on se trompe en prescrivant une supplémentation. Mais il faut absorber des doses énormes avant que cela ne soit toxique. La zone de toxicité se situe au-delà de 150 ng/ml sachant que la base plancher en dessous de laquelle on est considéré comme déficient est de 30 ng/ml. Le risque d’un excès de vitamine D est de développer une hypercalcémie et aboutir à des calculs rénaux.

Comment expliquez-vous que la majorité des Libanais souffre d’un déficit en vitamine D alors que le soleil y brille près de 300 jours par an?

On s’est aperçu que la nature étant bien faite, les populations qui habitent dans des contrées très ensoleillées fixent moins la vitamine D que celles des pays où le soleil se fait rare. Cette difficulté à fixer la vitamine D a pour fonction de réguler le taux sérique afin d’éviter un excès de cette vitamine. Or, de nos jours, les personnes originaires de pays comme le Liban se protègent du soleil soit en évitant les expositions soit en appliquant de l’écran total. Cela fait qu’elles ne s’exposent pas assez pour fixer la vitamine D. De plus, les femmes voilées sont carrément carencées! Il faut savoir qu’une femme qui souffre de carence en vitamine D transmet cette déficience à son nouveau-né. Il y a eu une étude effectuée au Liban conjointement par l’Hôtel-Dieu de France et l’USJ. Sur un échantillon de jeunes collégiens, 30% des filles et 9% des garçons étaient carencés en vitamine D. Il y a de
fortes chances que ces enfants soient nés déficients.

ALIMENTS RICHES EN VITAMINE D
Les poissons gras: saumon, sardine, maquereau, hareng, truite de mer; huîtres et crevettes, caviar, beurre; jaune d’oeuf; foie de poulet, champignons, principalement le Shiitaké.

Comment pallier ce problème?

Il faut commencer par effectuer une prise de sang afin de connaître son taux de vitamine D. Puis il faut adopter une supplémentation et surtout s’exposer au soleil dès que possible. Pour une meilleure assimilation, il faut prendre du magnésium et du zinc si l’on en manque. Tous les enzymes qui servent à métaboliser la vitamine D dans l’organisme requièrent du magnésium.

La vitamine D de synthèse que l’on ingère en ampoules, gouttes ou comprimés, est-elle aussi efficace que celle que l’on absorbe via les aliments naturels?

C’est essentiellement dans le poisson gras que l’on trouve de la vitamine D, mais l’alimentation n’apporte qu’une partie infime de la dose nécessaire à l’organisme. C’est donc l’exposition au soleil qui est la plus importante. Si l’on ne s’expose pas assez, il faut recourir à la supplémentation.

Afin d’obtenir sa dose journalière, est-il préférable d’opter pour une ampoule de vitamine D une ou deux fois par an, ou plutôt avaler un comprimé tous les jours?

Pour des raisons pratiques, les médecins prescrivent des ampoules fortement dosées à prendre plusieurs fois par an. Mais ce n’est pas très naturel pour l’organisme de recevoir des doses aussi importantes. On ne sait pas si la totalité de la dose sera assimilée. On a tout intérêt donc à tester son taux de vitamine D quelque temps après avoir ingéré la dose. La meilleure formule est de prendre un peu de vitamine D chaque jour de manière progressive. On trouve des suppléments sous forme de comprimés mais il est préférable de les prendre sous forme de gouttes quotidiennement. La liste de ces produits de supplémentation figure dans mon livre.

APPORT ORAL QUOTIDIEN DE VITAMINE D
Dose recommandée afin d’obtenir un taux sérique supérieur à 30 ng/ml: de 0 à 18 ans = 1000 UI;

adultes de plus de 18 ans ainsi que les femmes enceintes et allaitantes = 1500 UI à 2000 UI.

Quelle est la dose journalière recommandée?

Si l’on est du genre à ne pas s’exposer au soleil du tout, on peut prendre une dose 2000 UI par jour toute l’année. Si l’on s’expose au soleil pendant la période estivale, alors on se supplémente uniquement en automne/hiver (2000 UI par jour). Pour les jeunes de moins de 18 ans, 1000 UI par jour suffisent. S’agissant de personnes qui souffrent de maladies chroniques, il faut prendre une supplémentation adéquate afin de parvenir à un taux de 70 ng/ml. C’est au médecin de prescrire les doses nécessaires pour atteindre ce niveau. Le plancher de 30 ng/ml assure uniquement une bonne santé osseuse. Pour bénéficier des effets extra osseux, il faut arriver à 40 ng/ml, niveau à partir duquel on commence à stocker la vitamine.

Pour que la vitamine D soit métabolisée, il faut du magnésium, du zinc et même du cholestérol?!

L’excès de cholestérol est bien évidemment nuisible mais il faut un minimum de cholestérol afin de synthétiser la vitamine D.

Quel rôle joue cette vitamine dans le processus d’immunité?

Un rôle très important. On s’est aperçu ces 20 dernières années que de par son statut d’hormone, la vitamine D régule l’expression de 229 gènes dont des dizaines sont impliqués dans des cancers ainsi que des maladies auto-immunes. On remarque que plus on s’éloigne de l’Équateur, plus les cas de cancers et de maladies auto-immunes sont nombreux. On commence à avoir une explication biologique de ce phénomène. Notre organisme possède son antibiotique naturel: la Cathélicidine, qui lutte contre les agressions d’agents pathogènes. Le manque de vitamine D empêche la stimulation de la Cathélicidine qui aura du mal  combattre les agressions pathogènes. D’ailleurs, on remarque que les personnes déficientes en vitamine D contractent des grippes plus souvent que celles qui ne le sont pas.

Comment la vitamine D agit-elle sur la prévention du diabète?

Cela concerne principalement le diabète du type I. On s’est aperçu en Finlande qu’en diminuant les apports en vitamine D au fil des décennies, les cas de diabètes se sont multipliés. Lorsque les autorités sanitaires ont augmenté la dose de supplémentation, le nombre de diabétiques a considérablement baissé au cours des années. Même si l’on ne va pas guérir un diabète déjà diagnostiqué en prenant de la vitamine D, la supplémentation va combattre le terrain inflammatoire et réduire les risques de cécité ainsi que d’autres effets secondaires.

Vous mettez en cause l’utilisation abusive d’écrans totaux qui empêchent le soleil de fixer la vitamine D. Cruel dilemme: sans protection solaire on risque le cancer de la peau. Que faire?

Il faut prendre le temps de se mettre au soleil en dehors des heures chaudes bien sûr, sans écran total, et cela pour de fréquentes et courtes expositions. Ma formule c’est s’exposer un peu, souvent, sans tomber dans le rouge!

 
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