En col blanc évidemment. Et boutons de manchette en or. Jaune. Rose. Ou blanc. L’escroc a les cheveux bien lisses, gominés plaqués en arrière. Il peut aussi avoir le crâne chauve. Qu’importe. Il a surtout l’air bien propre. Loin de l’image du malotru, pauvre diable, en la compagnie duquel Madame, évidemment, éviterait de s’afficher.
L’Escroc a tout du mec fréquentable. Celui que l’on invite à tous les dîners. Qui est de toutes les manifestations publiques. Féru de mondanités. Homme du monde comme on les appelle. Du même monde que Madame? Pas si sûr. Car s’ils fréquentent les mêmes sphères, ils se ressemblent si peu, en réalité. L’escroc avance les crocs bien acérés. Avec une seule idée en tête: exploiter l’autre. L’utiliser. Le voler. Le tuer. L’éliminer… le tout bien proprement. Car cet escroc-là ne se salit pas les mains. Il opère en douceur. Il a souvent l’instinct d’un avocat, veillant bien à ne jamais se faire prendre la main dans le sac. Il est d’ailleurs souvent avocat, médecin, ingénieur… Député ou même ministre. Mais à quoi doit-il ce succès et cette notoriété? Si sa fréquentation est vivement recommandée, c’est qu’il joue bien le jeu. Tout simplement. Ce jeu, soit le culte de l’apparence, est la règle. Et qui fait que les autres croient à sa supériorité. Et sont convaincus de sa respectabilité. Pour peu qu’il roule dans une voiture neuve à vitres fumées, qu’importe qu’il soit criblé de dettes, que son appartement soit hypothéqué, ou qu’il ait malhonnêtement accumulé tous ses biens… Dans cette société du paraître, ils accourent de toutes parts. S’agglutinent et s’agitent autour de lui. Lui font des courbettes. Et lui servent du Estez à la pelle. Et s’il est effectivement riche, bien souvent, c’est parce que c’est un vrai requin en affaires. Sans états d’âme, il ne lésine pas à couper l’herbe sous les pieds de ses concurrents. Avec lui, ce sont toujours les autres qui sortent perdants. Ces autres payant cher le prix de leur bonne foi. Insatiable, il ne s’arrête jamais. Pour lui, «les affaires c’est les affaires». Mais ses conquêtes ont un goût d’acide. Un jour peut-être sera-t-il rattrapé par son karma. Après avoir mis tant de familles au chômage. Après avoir tant et si bien déshumanisé ses rapports, les basant sur le profit pur. Après avoir jugé les autres sur leur fortune. Sur leurs avoirs. Sur leur pesant d’or. S’en désintéressant dès qu’ils ont perdu de leur poids sur la balance de son intérêt, ou de son orgueil mal placé. Et s’en débarrassant sans autre forme de courtoisie. Intraitable, il veut prendre le pouvoir. Il aime qu’on l’admire. Qu’on le craigne. Accroché aux cordons de sa bourse, il se sent si important… Parce qu’il sait que sans elle, il ne vaut rien. Oui, car l’escroc est un moins que rien. Et s’il en impressionne encore beaucoup, quelques-uns le découvrent néanmoins tel qu’il est. Finalement, dans un si petit pays, les réputations se font et se défont plus ou moins rapidement. Et, un jour, le rideau tombe. N’est pas respectable qui veut. Non? Et surtout pas qui prétend l’être. À coup de titres, de dollars, de postes à responsabilité ou de fonctions haut placées. Au Panthéon des grands hommes, finalement, il n’est pas si facile de prétendre. Mais, que dans ce monde si bas, le statut d’escroc soit reconnu officiellement, et par devant la justice par-dessus le marché, est une toute autre paire de manches. Match point. Ou balle de match, comme l’a si bien dit Woody (Allen). L.Z. |
Madame et l’Escroc
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