Grand Maître du Grand Orient de France
Confrérie nimbée de mystère, la franc-maçonnerie est LE sujet qui ressurgit périodiquement dans les médias et fait booster les ventes des magazines! Rarement abordé dans des magazines féminins, ce «Spécial Homme» vient à point pour éclairer les lectrices (et lecteurs) sur ce sujet. Pour tirer au clair le vrai du faux nous avons posé les questions qui taraudent tout un chacun au Grand Maître du Grand Orient de France. Enarque et Normalien, Daniel Keller dirige le groupe de distribution Renault-Dacia et, le soir venu, il enfile son uniforme de Grand Maître du Grand Orient de France, la plus ancienne Obédience d’Europe.
À quand remonte véritablement la franc-maçonnerie?
La franc-maçonnerie à laquelle j’appartiens est apparue en 1717. Mais l’esprit de cette franc-maçonnerie s’est développé au cours du XVIIème siècle, à travers une évolution de sociétés de métiers qui vont progressivement perdre de vue le métier sur lequel elles étaient adossées et se transformer en sociétés de pensée. Les premières loges apparaissent en Irlande et en Angleterre au XVIIème siècle. Les Francs-Maçons vont tout de suite se donner des origines mythologiques en se présentant comme descendants des bâtisseurs de Cathédrales.
La franc-maçonnerie remonterait au Roi Salomon dont le temple aurait été conçu par l’architecte phénicien Hiram?
Il est clair que la franc-maçonnerie va tout de suite se doter de tout un appareil symbolique qui innerve la réflexion maçonnique. Le Temple de Salomon est une métaphore de l’aventure humaine; construction, destruction, concorde, discorde… Hiram constitue l’image de l’architecte… et puis le roman policier qui va avec puisqu’il est assassiné et que le Roi Salomon ordonne une enquête pour retrouver les meurtriers ainsi que le lieu où a été enseveli le corps. S’enclenche alors un récit d’une quête qui structure le parcours initiatique du Franc-Maçon. En même temps, que cherchait-on à lui prendre avant de l’assassiner? On voulait lui soutirer les mots symboliques et sacrés que les ouvriers s’échangeaient et qui constituent désormais la «parole perdue». Pour moi, cette «parole perdue» est celle du Père. C’est en réalité la vérité que l’on cherche en permanence et que l’on n’atteint jamais! C’est mon interprétation. À partir de là, se structure toute une progression du parcours initiatique qui permet un travail de construction et de réflexion sur soi-même auquel la franc-maçonnerie invite puisque c’est une société initiatique tournée sur la construction de l’homme.
Qu’est-ce qui vous a incité à devenir franc-maçon?
J’ai rejoint la franc-maçonnerie par esprit de filiation puisque mes parents en faisaient partie. J’ai voulu prolonger le chemin que d’autres avaient pris avant moi.
Quel est le profil des membres du Grand Orient de France?
Nous avons la chance de bénéficier d’une grande mixité sociale. Même si cette mixité n’est pas parfaite. Ce qui fait la force de la franc-maçonnerie est sa diversité et c’est ce qui lui a permis de traverser les épreuves du temps. Les partis politiques meurent bien! Il aurait pu en être de même pour la franc-maçonnerie. Non seulement n’est-elle pas morte, mais au contraire elle s’est développée!
Pour certains «Frères», le moteur principal ne serait-il pas d’appartenir à un réseau social et professionnel?
Si on cherche à entrer dans la franc-maçonnerie pour appartenir à un réseau, se faire un carnet d’adresses et en tirer des avantages, en général on repart du Grand Orient très vite.
Sûr?…
Sûr! Maintenant que la franc-maçonnerie constitue un réseau d’entraide, c’est comme les anciens de Polytechnique ou de Sciences Po… Ça n’a rien de scandaleux, mais en réalité on lui prête beaucoup plus qu’elle ne peut apporter dans ce domaine.
Rola Cusson
