Rima Khatib est architecte de formation. Mais elle porte un intérêt tout particulier aux enfants, collectionnant «leurs perles», leurs histoires, leurs questions. Dont celle-ci: «Quel âge j’avais quand je suis né?», titre de son livre destiné au financement de l’atelier des veuves de l’association SOS Village d’Enfants… Aujourd’hui, c’est une poupée bien particulière qu’elle dédie aux petits bouts de chou.
«Seul orphelinat à accepter des enfants de toutes religions, je souhaitais lui apporter mon soutien. Et c’est en visitant l’atelier de couture mis en place par l’association pour assurer un métier aux mères veuves – pour qu’elles ne soient pas obligées de placer leurs enfants à l’orphelinat – que l’idée m’est venue de les faire travailler.» Ces femmes réalisent des poupées folkloriques libanaises de façon artisanale. Mais ces poupées sont figées, elles ne bougent pas.
«En tant que designer, j’ai voulu créer une poupée différente, qui soit un jouet. Elle vient d’une planète, Zuwaria, et la collection porte le nom de Zuwar. Elle vient pour découvrir ses ancêtres, leur vie.» Elle voyage par champ magnétique et se retrouve sur la planète Terre à différentes périodes. Vêtue de vêtements futuristes venant de sa planète, toute en tissu (fabriqué au Liban), elle est articulée, bouge comme elle veut… Purement artisanale, sa fabrication est le fruit du travail des veuves de l’atelier de SOS Village d’Enfants.
Son premier voyage… chez les Phéniciens
Habillée comme les Phéniciens, la poupée est accompagnée d’un passeport – des stickers font office de visas pour chaque voyage… en Phénicie, par exemple – et d’un livre-guide sur ce peuple. Chaque page comportera une illustration et un sujet, le lieu de vie des Phéniciens, leurs activités commerciales. Ainsi, Lilia voyagera aussi dans le futur, donnant l’occasion aux gamins de faire usage de leur imagination dans une approche interactive.
Le prochain voyage de Lilia l’emmènera chez les Omeyyades, car c’est toute la région arabe qui est concernée.
«Neuf personnes ont contribué à la naissance de Lilia: illustrateurs, graphistes, designers de mode, une historienne, enfin un professeur de l’UL qui a supervisé la rédaction des textes. Ce jouet s’adresse à des enfants âgés entre 5 et 10 ans. Le livre-guide comporte des textes en français, anglais et arabe. Comme la fabrication de cette poupée est coûteuse, explique Rima, et que nous souhaitons la vendre à un prix abordable, nous aurons besoin de sponsors à l’avenir. Je pense aux agences de voyage et autres compagnies aériennes… sachant que Lilia est une globe-trotter!»
Le pourquoi de ce projet
Il a vu le jour à l’intention des veuves de l’atelier de couture de SOS Village d’Enfants. C’est aussi un projet à but éducatif. «Le jouet arabe est inexistant au Liban et dans la région. Mes enfants sont franco-libanais et n’ont pas appris l’histoire du Liban. C’est peut-être un moyen ludique de la leur enseigner. Avec tout ce qui se passe, c’est dire en quelque sorte à l’enfant: «Tu as des origines et tu n’es pas que ça» (ce qu’il voit aujourd’hui). Mon but consiste à leur ouvrir les champs des possibles basés sur la diversité du passé. J’aurai fait quelque chose pour mon pays. Apporter une certaine culture, avec un côté affectif puisqu’il s’agit de jouer à la poupée. Cela a un meilleur impact qu’une leçon de morale.»
Pour le moment, la poupée ne s’adresse qu’aux filles, bien sûr. Mais Rima espère trouver bientôt une idée pour imaginer un autre jouet ludique et éducatif pour les petits garçons… Un marin phénicien et son bateau, par exemple.
Lilia et son livre de 16 pages sera disponible sur le marché à partir de la mi-novembre.
M.S.B.