Le suicide tend à devenir un véritable fléau social! Les statistiques du département de psychiatrie et d’Embrace de l’AUBMC révèlent qu’actuellement, au Liban, une personne se suicide tous les trois jours. Cause de décès évitable, la prévention ne devient-elle pas un enjeu majeur de santé publique?
Le suicide à travers le monde tue plus que les guerres, que les actes de terrorisme et que les homicides. Il est donc urgent d’intervenir, de mettre sur pied des mesures préventives efficaces et d’agir afin de diminuer le comportement suicidaire. Selon l’estimation de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), 800 000 personnes mettent fin à leurs jours chaque année: environ une personne toutes les 40 secondes.
Le Liban est particulièrement touché par ce fléau, puisqu’on estime à 15% le nombre de jeunes libanais(es) de 13 à 15 ans ayant sérieusement envisagé de se donner volontairement la mort au cours des douze derniers mois, ou ayant tenté de passer à l’acte.
L’association Embrace, en étroite collaboration avec l’AUBMC, a mené l’enquête auprès de jeunes étudiants et lancé sous le parrainage du ministère de la Santé, et en présence du ministre de la Santé Publique Wael Abou Faour, une importante campagne de sensibilisation, dans le but d’attirer l’attention de la population sur l’importance de la problématique du suicide des jeunes, tout en l’outillant pour faire face au risque suicidaire. «C’est un sérieux problème de santé publique qui touche toute la communauté», déclare le Dr. Ziad
Nahas, Président du département de psychiatrie de l’AUBMC, lors de la conférence de presse tenue à l’Institut Issam Farès (à l’Auditorium de l’Université Américaine de Beyrouth).
Le Dr. Ziad Nahas, le ministre Wael Abou Faour et le Dr. Mohamad Sayegh. |
«Le phénomène est présent partout dans le monde et touche des individus de n’importe quel âge. C’est aussi la deuxième cause de décès chez les jeunes entre 15 et 29 ans. Sur une vingtaine de personnes qui tentent de mettre fin à leur vie une seule en meurt.» Dans son dernier rapport sur la lutte contre le suicide, l’OMS a signalé 43 décès survenus au Liban en 2012, alors que 107 cas ont été officiellement recensés dans les registres libanais. Force est de constater dès lors que dans notre société, une personne se suicide tous les trois jours! Toutefois, les experts pensent fermement que ce chiffre ne correspond pas au nombre exact de tentatives, soigneusement camouflé pour des considérations d’ordre social, religieux et juridique…
Par ailleurs, des études récentes menées par le département de psychiatrie à l’AUBMC mettent l’accent sur le taux élevé d’idées suicidaires chez les jeunes et soulignent l’urgence de lutter contre ce phénomène, pour mieux le prévenir.
«Le geste suicidaire est évitable, ajoute le Dr. Nahas. 90% des cas sont le résultat d’une pathologie mentale. La majorité de ceux qui passent à l’acte sont atteints de troubles psychiques curables (dépression, drogue, dépendance à l’alcool, schizophrénie…).» Rappelons qu’au Liban, une personne sur quatre souffre d’un trouble mental, mais seule une minorité accepte de le reconnaître et de suivre un traitement.
À cette fin, Embrace brise le silence, le tabou… et s’engage, à travers sa campagne nationale, à informer, à sensibiliser le grand public afin de faire face à «ce fléau» et de venir en aide aux personnes les plus vulnérables ainsi qu’à leurs proches…
Le Dr. Mohamad Sayegh, Doyen de la Faculté de médecine de l’AUBMC, insiste sur «la nécessité d’être à jour dans les domaines de la neurologie et de la psychiatrie et de bien adapter les techniques de pointe en vue d’une meilleure avancée de la recherche tant au niveau scientifique qu’académique.»
La campagne est axée sur:
1) La conception et la diffusion d’un matériel de sensibilisation et de communication
Un spot télévisé avec le ministre de la Santé Publique, Wael Abou Faour, des panneaux publicitaires, des affiches…
2) L’organisation d’événements publics pour une prévention plus visible et pour rappeler qu’un Libanais tente de mettre fin à sa vie tous les trois jours
«Akid ra7 fee2» (je vais sûrement me réveiller) est le titre de la campagne menée pour encourager le public à participer à la marche qui a eu lieu le
21 septembre, à 5h00 du matin. Les fonds recueillis sont destinés au financement d’une «hot line» (service inexistant à ce jour au Liban) pour venir en aide à ceux qui cherchent d’autres solutions que la mort pour surmonter leurs problèmes.
M.A.F.