«Toute éducation est ratée»… Peut-être! Freud ne se faisait déjà aucune illusion sur la question… Quoique proférée par «le» grand spécialiste de «l’Âme», cette constatation qui sonne tel un verdict ne nous avance pas beaucoup. Il faut quand bien même éduquer.
Source inépuisable de débats et de polémiques, le concept évolue et change, au gré des générations. Du martinet à «l’enfant roi», du père fouettard aux «papa/maman» laxistes… La formule magique n’est pas près de voir le jour.
Pour éclairer un tant soit peu notre lanterne, nous avons questionné Danielle Pichon, psychologue clinicienne et neuropsychologue. La spécialiste côtoie parents et enfants depuis des années. Alors, l’éducation, c’est son affaire!
Aussitôt le sujet mis sur la table, sa première réaction en dit long. «Lorsque des parents viennent consulter avec leur enfant pour un problème d’éducation, je panique presque, car il me faut déployer une énergie atomique!, confie-t-elle tout de go. C’est très simple, car il me faut rappeler des notions élémentaires relevant d’une éducation basique, à savoir, rester calme, ne pas mettre les pieds sur la chaise, éviter de jeter un kleenex sale sur la table…»
Il n’écoute pas, n’obéit pas, nous avons tout essayé…
«C’est en ces termes que les parents font appel à l’aide, confie Mme Pichon. En fait, quand l’entretien débute (je vois toujours parents et enfants ensemble), je suis choquée par la façon dont le petit s’adresse à sa maman. De plus, il n’est jamais au courant du pourquoi de cette consultation», déplore la spécialiste.
«On va chez une amie, lui disent-ils, ou je ne sais quoi d’autre… Alors qu’il est le premier concerné. Les parents sont pourtant tenus de lui expliquer qu’ils viennent chez une spécialiste qui va leur apprendre comment agir avec lui pour qu’il soit content et pour que papa ou maman cessent de crier. Dire les choses clairement et simplement dans le but de dédramatiser la situation pour le gamin. Et pour ce faire, je recours le plus souvent à une certaine forme d’humour… Un petit exemple au passage: «Il paraît que tu as parfois les oreilles dans ta poche lorsque maman t’appelle…» L’enfant est ainsi prêt à changer d’attitude. Ça marche avec une rapidité qui tient du miracle», affirme Mme Pichon.
La constance éducative
«L’inconstance mène bien vite à l’épuisement. Il faut savoir que les enfants ont une énorme capacité à mener leurs parents à bout. C’est simple, ils les observent toute la journée et finissent par connaître leurs points faibles! Exemple classique: en réclamant une chose une dizaine de fois, une demi-heure durant… les parents finissent par céder de guerre lasse. Dire non aujourd’hui et oui demain, pour une même demande, est le pire des comportements, car l’enfant sait dès lors qu’en insistant un tant soit peu, son parent va finir par lâcher prise.»
Les parents doivent établir une relation éducative et tout à la fois aimante. Une relation de confiance et d’intérêt avec l’enfant. Donner juste des ordres ne suffit pas. Les moments de partage sont essentiels, comme les repas par exemple.
Sanction immédiate en cas de désobéissance
«Je veux une glace maintenant, avant le dîner.» Maman dit non et explique le pourquoi de son refus. L’enfant n’entend rien et insiste. Bref, il devient capricieux. Maman tient bon: «C’est soit une glace après le dîner soit rien. Point.»
Il faut être clair et reprendre une relation normale immédiatement après avoir donné l’ordre. Passer à autre chose afin que l’enfant comprenne que l’interdit est la conséquence d’un comportement et qu’il ne signifie absolument pas un rejet de sa personne. S’il insiste, se jette par terre ou pleure, c’est qu’il sait que le parent va finir par céder. Ce genre d’attitude mène à un débordement outrageant des règles. Des petits se permettent de hurler dans un lieu public; d’autres de s’agiter dans les allées d’une église… Les parents ne réagissent pas. Ou s’ils le font, ils en sont presque fiers, telle cette maman qui n’a pas trouvé mieux que de filmer ses enfants et leurs amis en train de faire un tintamarre du diable dans un restaurant avec les couverts et les assiettes! Bravo quoi!
«Le NON le RESPECT DES AUTRES est inadmissible. En fait, il ne s’agit pas de labelliser l’enfant mais de croire en lui et de le lui montrer. Le fait de croire en lui est en soi une limite… On peut le lui expliquer en ces termes: Tu n’es pas un mauvais garnement, je ne vais pas te «dresser». Tu es un enfant extra mais si tu dépasses les limites, je serai sans pitié…»
Marianne Saradar Barakat
