Sixième sens ou vision prémonitoire, Maya, qui était de passage à Paris la semaine du 11 novembre, a été prise d’une peur panique lorsque brusquement, alors qu’elle visitait une expo dans un musée, elle a eu une effroyable vision: des hommes armés cagoulés qui s’apprêtent à tirer sur les présents et à les prendre en otage. Témoignage.
Cela peut paraître absurde voire incroyable et pourtant ce que je vous raconte a été vécu intensément. Nous sommes arrivés à Paris mercredi 11 novembre au soir. Jeudi 12, je me préparais avec enthousiasme à l’idée de découvrir l’expo Fragonard au musée du Luxembourg. Les places avaient été réservées depuis Beyrouth, pour 11h00. À l’arrivée au musée, nous avons été soumis à une inspection policière, le plan Vigipirate étant appliqué depuis un bon moment à certains endroits stratégiques de la ville. Pour une personne comme moi résidant au Liban, ce genre de fouille est monnaie courante.
Dans les vestiaires, pour déposer nos manteaux, j’ai demandé à mon mari de m’attendre, le temps de passer aux toilettes qui se trouvent au -1. Alors que je m’y rendais, une vision apocalyptique s’est imposée à moi, me glaçant d’effroi. J’ai «vu» des hommes armés faire irruption dans le musée, tirer sur la foule et nous prendre en otage. Je ne savais pas comment calmer cette folle panique qui s’est emparée de moi. Je suis vite remontée et sur le moment je n’ai rien dit. J’ai mis ma pâleur subite sur le compte d’une chute de tension comme j’ai l’habitude d’en avoir.
Nous visitons l’expo passant d’une pièce à l’autre mais impossible de me concentrer sur les chefs-d’œuvre qui défilaient sous mes yeux. Je guettais les portes, dévisageais les gens, vérifiais s’il était possible de se cacher quelque part si jamais l’attaque survenait. La visite prend fin sans que le pire ne se produise. J’ai quand même attendu que l’on soit loin du musée dans un bistrot, pour faire part à mon époux de tout ce que je venais de visualiser. Il m’a traitée d’irrationnelle, m’a dit que «la France n’était pas Beyrouth», et qu’il ne voyait ni comment ni pourquoi une telle attaque pouvait avoir lieu. Que ces hommes-là «ne pourraient même pas arriver armés à l’entrée du musée». «Ils pensent, peut-être, donner ainsi une leçon à la France en la frappant au cœur de sa culture, spécialement dans une expo délicieusement libertine qui dépeint le monde des fantasmes», ai-je rétorqué. Mon époux me regardait avec des yeux incrédules, me sommant de me «changer les idées». Je me suis tue alors que l’angoisse me tenaillait toujours. Elle était là, présente, et me nouait le ventre.
Le lendemain, ce vendredi 13 de triste mémoire, je devais faire quelques courses du côté des grossistes, quartier juif. Là aussi, je me suis sentie mal à l’aise. Je n’avais qu’une seule hâte: me tirer de là. Je me disais: vendredi 13 et dans un quartier juif, ils frapperont sûrement là. Le soir, après avoir dîné tôt, nous sommes rentrés à l’hôtel.
Trente minutes plus tard, l’enfer ouvrait ses portes sur Paris. J’étais doublement sous le choc: tout d’abord de voir se réaliser ce que j’avais pressenti si fort comme dans un film d’horreur, et aussi parce que l’horrible tragédie dépassait de très loin la terrible scène que j’avais présagée. «Mais c’est Beyrouth!», murmurait mon mari installé devant la télé. «Tu as dit irrationnelle?», ai-je demandé. Ce à quoi il m’a répondu: «Je ne sais pas comment expliquer ce que tu as vécu…»
Quatre fois dans ma vie j’ai eu ce genre de pressentiment, et les quatre fois mes appréhensions de la veille se sont réalisées le lendemain!
B.I.