Les récentes attaques en Europe menées par des militants soutenant les mouvances d’al-Qaeda ou de l’État Islamique ont mis en exergue le rôle marquant joué par leurs femmes, épouses, sœurs ou mères. Ces petites chevilles ouvrières des réseaux terroristes défendent âprement la cause djihadiste dissimulées derrière le voile épais de leur niqab.
Ces nouvelles militantes occupent désormais les premières pages des magazines islamistes comme «Dabiq», la publication de l’organisation État Islamique (EI) en langue anglaise ou le numéro francophone «Dar al-Islam». Dans ce premier numéro en langue française, figure une entrevue avec la veuve d’Amedy Coulibaly,
Hayat Boumeddiene, «Ces femmes sont très médiatisées souvent dans le but de servir de modèle à ces groupes», souligne Carole André-Dessornes, docteur en sociologie et auteure du livre «Les Femmes-martyrs dans le monde arabe: Liban, Palestine, Irak».
Dans l’article paru dans Dar al-Islam, Boumeddiene évoque le souvenir de son mari, responsable de la mort d’une policière puis de quatre otages dans un supermarché casher à Paris – une attaque lancée suite à celle contre Charlie Hebdo, ayant fait 12 morts début janvier – avant d’être abattu par la police. L’attaque avait été menée par les frères Kouachi, membres de la cellule des Buttes Chaumont. «Dans son cœur brûlait le désir de rejoindre ses frères et de combattre les ennemis d’Allah dans le califat, explique-t-elle en parlant de Coulibaly. Ses yeux s’illuminaient à chaque fois qu’il voyait les vidéos de l’EI», ajoute la jeune femme âgée de 26 ans, recherchée par les services de sécurité français depuis les attentats
de Paris.
Selon les autorités turques, elle serait actuellement en Syrie, ce qui est également confirmé par l’article de “Dabiq”. Hayat encourage également ses compatriotes à l’hijra (l’émigration) vers l’État Islamique en ajoutant avoir pu se rendre sans problème en Syrie.
Selon le magazine français Marianne, la jeune épouse aurait soutenu les activités terroristes de son compagnon. Vers la fin du mois de mars 2010, elle aurait été chargée par Amedy Coulibaly, de «débloquer les fonds» qu’il a accepté d’offrir, conseillé par Djamel Beghal, le mentor de la cellule terroriste des Buttes Chaumont, à une association caritative gérée par «un frère (…) qui a fait pas mal de djihad [en Afghanistan]» et qui œuvrait pour les enfants palestiniens, toujours selon Marianne. Elle aurait également acheté, avant l’attaque de l’Hyper Casher de la Porte de Vincennes, une Mini Cooper noire, en partie grâce à des «fonds» propres, voiture qui aurait pu servir de monnaie d’échange à Coulibaly désireux de se procurer des armes auprès d’un trafiquant belge de Charleroi. Selon André-Dessornes, des communications auraient été interceptées entre les portables de Boumeddiene et de la femme d’un des frères Kouachi.
À l’époque, le compagnon de Hayat, Amedy Coulibaly, était incarcéré pour avoir tenté de faire évader, sans succès, Smaïn Ait Ali Belkacem, l’artificier des attentats de 1995, commis dans le RERC, à Paris. Très souvent, ce sont ces femmes à l’instar de Boumeddiene qui jouent le rôle d’intermédiaire et permettent aux terroristes de communiquer avec le monde extérieur. Ainsi, Sakina, la sœur de Djamel Beghal, le mentor des frères Kouachi et d’Amedy Coulibaly, aurait été chargée de remettre un mystérieux paquet à Amedy Coulibaly.
Mona Alami