Officiellement, l’homosexualité est interdite au Liban. Tout le monde le sait. Pourtant, lentement mais sûrement, ce tabou commence à sortir de l’ombre et les gays ont désormais leurs lieux de prédilection où ils s’affichent librement. Soirée dans un bar gay? Des découvertes osées et époustouflantes qui montrent une fois de plus que la capitale libanaise à la réputation sulfureuse reste pionnière dans un Moyen-Orient en pleine régression.
Dimanche, 23h00. Nous voilà entraînés dans un pub branché qui affiche complet dès jeudi soir et pendant tout le week-end. Toute la rue est électrisée par ce lieu aux odeurs de soufre devant lequel des voitures somptueuses s’arrêtent déversant des hommes aux regards intenses, impatients de savoir ce que la soirée leur réserve. Des jeunes gens apparemment moins nantis arrivent à pied. C’est l’endroit “in”. Celui qu’il est obligatoire de connaître, que l’on soit riche ou pauvre, bourgeois ou prolétaire. Devant l’entrée, des videurs musclés assurent la sécurité. L’intérieur aux murs noirs est animé par des néons de couleur. Dès que l’on franchit le seuil, pendant quelques instants, on se sent un peu perdus, déboussolés: des hommes apprêtés, maquillés, déploient leur charme à la manière des plus professionnelles des courtisanes. Certains sont assis dans leur coin à scruter avec délectation ce qui se passe autour d’eux. D’autres ont envahi la piste ou grimpé carrément sur les tables se déhanchant aux rythmes de la musique. D’autres encore sont totalement sous l’emprise de celui qui leur fait tourner la tête et avec qui ils comptent finir la soirée…
Quelques femmes à l’allure un peu masculine ou originale ou tout simplement ordinaire dansent ou discutent. Leur présence se fait plus discrète que celle de ces messieurs. Leurs regards s’allument dès qu’une nouvelle présence féminine se profile dans les lieux… Souriez, vous êtes dans un des hauts lieux de la drague homosexuelle de Beyrouth. La fête peut commencer.
Ici, les hommes portant des boucles d’oreilles ne suscitent aucun regard réprobateur. Affublés de bagues, colliers, bracelets et, pourquoi pas, de boucles dans les cheveux, ils n’attirent pas l’attention des autres. Ceux qui se maquillent n’éveillent même pas l’étonnement. Yeux charbonneux, rehaussés de faux cils, lèvres rouge passion: il n’y a aucun problème à s’afficher comme on le souhaite et à déambuler avec aisance telles des stars de la scène artistique. Seule interdiction pour les hommes: porter des robes.
Danièle Gerges